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Hier s’est terminé quelque chose.

Et je pleure en écrivant cela. Je pleure d’une joie indescriptible. Je pleure d’une tristesse infinie aussi. Je pleure d’émerveillement et de toute la beauté traversée. Je pleure de ces 33 mois de miracles, vécus chaque jour, à chaque instant depuis.

Hier, mon sang est revenu. Après 2 ans et 9 mois d’aménorrhée. Et je pleure en écrivant cela. Comme si après tous ces mois de don total à la maternité, je retrouvais une partie de moi.

Je pleure parce que pour la première fois de ma vie, le sang coule sans douleur. Parce qu’aujourd’hui il n’a plus la couleur de la graine qui n’est pas restée. La saveur de l’attente, du désespoir, des prières qui n’ont pas été entendues, du vide dans le ventre. Il coule, immaculé et pur, comme une trace de toutes les guérisons que j’ai reçues depuis.

Je pleure parce que je sais que c’est un temps qui se termine. Celui de la bulle d’amour partagée, de la fusion avec ma bébé. De mon utérus au repos, suspendu, qui m’a laissé tout ce temps de plus, que toute ma vie je chérirai.

J’ai dit tant de fois que je donnerais tout pour revenir en arrière, pour arrêter le temps. Pour la sentir encore une fois, même un instant, bouger au creux de moi. Je n’oublierai jamais. Sa présence dans la chair. Son passage dans la douleur. Nos renaissances, cœur contre coeur. Ce lever du jour du 19 décembre 2022. Cette lumière qu’elle a été, en une fraction de seconde, sur toutes ces années de séparation, d’oubli et de souffrance.

C’est elle qui m’a ramenée à la Maison, celle que toute ma vie j’avais cherchée. C’est elle qui m’a rappelée à mon essence.

Et ce matin, en versant ce sang de grâce dans la terre, au pied de mon rosier, j’ai remercié. Et j’ai repensé au filament d’amour dont ma mère parlait toujours. Ce fil qui malgré la distance, les épreuves, les rancunes, le temps qui est passé, ne s’est jamais brisé. Et j’ai su que je pouvais la laisser s’envoyer ma bébé. Que la vie ferait son œuvre. Et que comme elle a su le faire, quand dans mes prières je l’appelais, elle connaîtrait toujours le chemin, le fil d’or, pour me retrouver.