Maternité

Ce premier été.

Mon premier été à ne pas travailler. A laisser les semaines passer, à ne pas savoir quel jour on est. Je l’ai vécu comme une bénédiction cet été, comme un véritable cadeau que je nous ai offert. Celui de ce temps ensemble, que plus jamais nous ne revivrons.
Il est passé trop vite cet été. Chaque jour, j’ai voulu revenir en arrière. Arrêter de respirer en espérant immortaliser quelque chose.
J’ai aimé ce premier été, si fort. La sueur sur ses cheveux quand elle buvait mon lait, sa petite respiration sur ma peau moite, nos corps nus, l’une contre l’autre. Peu importe la chaleur étouffante, nous nous sommes collées, comme si l’une et l’autre savaient, que ce serait le premier et le dernier été comme ça.
Il m’a épuisée. Il m’a vidé de ma substance. Il m’a cassé le dos, brisé le corps en mille morceaux. Il m’a fait toucher mes limites. L’ennui. L’épuisement aussi. Mais j’ai chéri chaque nuit, entrecoupée. J’ai chéri les siestes les volets fermés où je restais là éveillée à la regarder, malgré la fatigue et toutes les choses à faire. J’ai aimé mon corps mou. Mon ventre encore gonflé de l’avoir portée. Je n’ai pas envie de le perdre ce ventre. Parce que je ne veux pas m’éloigner de ses premiers mois. J’ai aimé mes bourrelets contre les siens. Les marques sur mon corps que j’apprends à aimer parce qu’elles me rappellent tout ce qu’avec elle j’ai traversé.
J’ai eu envie qu’il s’arrête cet été. Qu’il dure pour toujours. J’ai eu envie de retenir chaque dent qui a poussé. De retarder le moment où elle s’assiérait pour se tourner vers le monde. J’ai eu envie de profiter de chaque seconde. Car je sais qu’elle ne m’appartient pas, qu’aujourd’hui elle me fait le cadeau d’être là, de m’avoir choisie pour l’accompagner à vivre et à grandir. Et que depuis sa naissance, le seul et véritable apprentissage que je dois faire c’est de pas à pas la laisser partir.

Crédit photo: @halouny