Maternité

Hier soir j’ai voulu retrouver une photo de mon ventre après l’accouchement.

Et j’ai laissé défiler les images de tous ces derniers mois. La grossesse. Mes joues gonflées. Mon ventre tiré. Toutes les marches que nous avons faites pour déclencher son arrivée. Le souvenir de ses dernières semaines dans mon ventre. L’attente. Le délai dépassé. Le dernier coucher de soleil et cet arc-en-ciel juste avant d’embarquer. Puis le sang. L’accouchement. Le visage bouffi et fatigué. Mais le courage et la puissance dans le regard. Ma première photo avec elle, mon visage couvert de ces fluides que pendant des jours je n’ai pas voulu nettoyer. Son visage d’extraterrestre des toutes premieres heures. Son premier regard. Le corps minuscule. Ses cheveux noirs. Le cordon. Mes gestes maladroits. Et alors que je laissais défiler tout ça, j’ai senti mon cœur se serrer, de savoir que tout cela désormais appartenait au passé. J’ai oublié combien mon ventre avait été gros. J’ai oublié combien son corps avait été petit. Et les larmes ont coulé. De réaliser combien le temps passait. De savoir que plus jamais je ne revivrai ces moments. De réaliser que tout passe, que rien ne dure, que rien ne m’appartient, qu’elle va grandir, un jour m’échapper, un jour souffrir et puis prendre sa liberté.

C’est fou de ressentir de la nostalgie pour quelque chose qui est là. C’est fou de ressentir qu’elle me manque déjà alors qu’elle est dans mes bras.

J’ai tellement de gratitude pour ces images que sur le moment je n’ai pas aimées. D’avoir un souvenir immortalisé de ce qui un jour a été douloureux mais qui avec le temps est devenu ce que j’ai de plus précieux. J’ai tellement d’amour pour cette grossesse qui m’a pourtant fait tant souffrir, pour l’accouchement dont je n’aurais jamais pu imaginer la violence et l’intensité, pour les premiers jours perdue dans une nouvelle réalité, la solitude et la difficulté des premiers mois avec mon bébé. Et chaque jour je me rappelle de vivre l’essentiel. Chaque mère que je rencontre me dit; profite, ça passe tellement vite. Je ne peux pas croire que cela fasse déjà 5 mois qu’elle est née. 5 mois c’est long et pourtant je n’ai rien vu passer.

Alors que j’ai vécu chaque jour, chaque nuit, chaque heure à ses côtés. Alors que j’ai l’impression de ne pas avoir vécu avant elle. Comme si ma vie se résumait à ces 5 mois. 5 mois d’extrême beauté, d’extrême intensité, d’extrêmes difficultés. 5 mois pour comprendre que je dois vivre chaque moment, accepter que le temps m’échappe, ne pas m’attacher à ce qui un jour a été. Pour simplement être là. Dans le présent. A chaque instant. Et honorer ce que j’ai tant désiré, tant attendu et qu’enfin un jour la vie m’a donné.

A toutes les femmes qui ont dans leur bras leur bébé. A toutes les femmes qui sont en chemin pour le rencontrer. Et à celles qui attendent avec tant d’amour qu’une petite âme vienne les retrouver.