Maternité

Ne pas oublier (partie 2)

Mais moi, chaque jour depuis, je m’efforce de me souvenir. De l’indicible. De l’insurmontable. De la violence aussi. Je n’aurais jamais imaginé.
Pourtant je décide de replonger dans le souvenir de cette intensité. Parce que je ne veux pas oublier. Parce qu’oublier ce que nous traversons pour enfanter, c’est oublier combien nous sommes puissantes. C’est oublier cette force que j’ai puisé au fond de moi.

Une force qui jaillit, lorsque les genoux tombent à terre, nue faces à elles, crue, sans pudeur, les cris qu’il n’est plus possible de retenir. Ces cris qui viennent d’ailleurs, du fond des âges, lorsque les femmes enfantaient dans leur puissance et leur liberté.

Une force qui me rappelle que rien ni personne ne peut me sauver. Que c’est entre moi et moi. Et mon bébé.

Une force qui lorsque j’ai posé les armes et accepté de mourir est venue me soulever. M’emmener dans un autre monde. Là où dans le rien, le vide, j’ai pu rencontrer l’esprit de mon bébé.

La sensation de descendre en enfer. Et pourtant quelque chose qui s’apaise parce que j’ai accepté.

Cette force je m’en souviendrai toujours. Parce qu’elle est au fond de moi et que dans le désespoir, cette nuit-là, elle m’a dit; tu vas le mettre au monde ton bébé.